Historique de la grisaille
Origine de la grisaille :
Les plus anciennes pièces de vitrail retrouvées sont souvent peintes.
Les fragments d'une cive de Ravenne (VIème siècle) montrent les restes d'un Christ Pantocrator. Il s'agit de tessons incolores qui sont conservés au musée national de Ravenne. Les pièces les plus anciennes semblent dater de 540.
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Les fragments de la "tête de Lorsch" date du IXème siècle. Ils ont été retrouvés dans le choeur de l'abbatiale de Lorsch près de Heidelberg en Allemagne. Cet ensemble est conservé au Musée de Darmstadt.
La « petite tête de Schwarzach » actuellement conservée au Badisches Landesmuseum (BLM) à Karlsruhe en Allemagne date du Xème siècle.
La tête de Christ de l'abbaye de Wissembourg, conservée au musée de l'Œuvre de Notre-Dame de Strasbourg, date du XIème siècle.
Cependant, le traité du moine Théophile au début du IXème sur l'art de teindre le verre et de le dorer, ne parle pas de l’art de le peindre.
On remarque que sur les vitraux en place les plus anciens (Augsbourg, 1100), la technique est déjà très maîtrisée. D'où l'hypothèse que la grisaille était déjà utilisée bien avant cette période.
Le terme "grisaille" dans le sens matériau vitrifiable n'apparaît pas avant le XIXème siècle.
Dans le traité du moine Théophile, c'est le terme « couleur » qui est utilisé. Plus tard, on trouve les termes « couleur noire » et « peinture noire ».
La grisaille du Moyen Age jusqu'au XIVème siècle, est brune. Plus précisément brun rouge jusqu'à noir selon l'épaisseur travaillée.
A partir du XVème siècle on voit apparaître dans les ateliers, en même temps que les grisailles rousses, rouges et noires, des grisailles nommées « sanguines sur verre » et grisailles « couleur bois ».
La fabrication des grisailles se faisait au sein des ateliers par les peintres verriers et les recettes étaient transmises de génération en génération.
La période néoclassique (XVIIème et XVIIIème siècles) suspend la fabrication des grisailles comme celle des verres.
Au XIXème siècle, un regain d'intérêt pour le vitrail fait redémarrer la fabrication des peintures.
Des fabricants retrouvent ou recomposent des recettes de grisailles en s'appuyant sur les anciennes datant du Moyen Age et en s'inspirant des peintures utilisées en céramique (manufacture de Sèvres). Les grisailles colorées sont largement utilisées. La demande très importante amène l'industrialisation de la production par des entreprises indépendantes des verreries.
Cette nouvelle façon de dissocier la fabrication des produits de ses utilisateurs se fait au détriment des verriers ; en effet, ceux-ci ont de moins en moins la connaissance des compositions et réactions des peintures qu'ils emploient et il en résulte des problèmes de conservation qui perdurent jusqu'à aujourd'hui.
Vers le milieu du XXème siècle les derniers fabricants français de peintures sur verre (Lacroix, l'Hospied, Poulenc) abandonnent la production faute de demande suffisante pour maintenir rentables leurs usines. Les verriers deviennent tributaires des fabricants étrangers (Degussa, Ruger, Blythe). Une commission de travail est donc créée (Section Française de l'Institut International de Conservation ; www.sfiic.free.fr), elle a pour but de redonner aux verriers la connaissance et la maîtrise des produits indispensables à leur activité.
Parallèlement le Laboratoire de Recherches des Monuments Historiques souhaite que soit mise en place une gamme de peintures sur verre qui puisse être utilisée en restauration pour la réalisation des compléments. Les caractéristiques requises sont la cohérence avec les peintures anciennes et la durabilité des produits. L'étude de la formulation des grisailles et émaux se rapprochant des données trouvées dans les traités anciens (Théophile, Eraclius) et des analyses de peintures sur verre du Moyen Age sont confiées à Hervé Debitus.
Pour réaliser sa gamme de grisailles, il s'est intéressé lui aussi aux manuscrits des fabricants Lacroix et aux compositions des peintures sur céramique.
Les différents écrits expliquant la fabrication des grisailles sont souvent difficiles à mettre en œuvre car ceux qui les écrivaient étaient, soit des observateurs extérieurs (moine Théophile), soit des personnes connaissant très bien les produits n'éprouvant pas le besoin de tout marquer (manuscrits Lacroix). Il y a donc beaucoup de non-dits, des produits qui ne se fabriquent plus, des produits qui ont changés de nom et des peintures dont la composition n'est pas détaillée.
Depuis 1991 la gamme de grisaille « Hervé Debitus » est commercialisée.